L'idée que les innombrables organismes vivant sur la Terre sont le fruit d’une intervention divine, racontée dans la Bible, n'est pas nouvelle. En dehors des créationnistes durs - attachés à une lecture littérale des Ecritures, et qui sont malheureusement plus nombreux qu’on pourrait s’y attendre - aucune personne douée de raison et informée ne préconise une interprétation aussi stricte du récit biblique de la création. La notion d’intervention divine est toutefois défendue par de nombreux cercles religieux et autres (dont quelques rares scientifiques) adeptes du “ dessein intelligent ”. Selon cette théorie, certaines étapes de l’origine et de l’évolution de la vie sont inexplicables. La plupart des scientifiques la rejettent, car elle ne repose sur aucune preuve crédible et est contraire aux principes scientifiques.
La science donne une version de la Genèse moins pittoresque mais tout aussi extraordinaire que celle de la Bible. La Terre est née, avec le Soleil et les autres planètes, dans un tourbillon de gaz et de poussière, il y a environ 4,5 milliards d’années, soit un peu plus de neuf milliards d’années après le Big Bang. Un demi milliard d’années plus tard, notre planète, enfin remise de cette naissance violente, était physiquement capable d’accueillir la vie. C’est ce qu’elle fit un peu moins de cinq cent millions d’années après, avec LUCA, le "dernier ancêtre commun universel", qui devait donner naissance par le biais de l’évolution à toutes les créatures vivantes, y compris les microbes, les plantes, les champignons, les animaux et les humains.
Les organismes primitifs ont surgi d’une matière minérale, probablement dans des eaux volcaniques chaudes, sulfureuses et chargées de métaux. Cette mixture peu ragoûtante était “ assaisonnée ” de petites molécules organiques : acides aminés, sucres, azote et autres éléments classiques des composants biologiques. L’une des découvertes les plus stupéfiantes des dernières décennies, grâce à l’exploration de l’espace et à l'étude des corps célestes proches, en particulier des météorites tombés sur la Terre, est le fait que beaucoup d’éléments chimiques constitutifs de la vie se forment spontanément dans tout l’univers. La chimie organique, baptisée ainsi parce qu’on la croyait l’apanage des organismes vivants, repose en réalité sur l’élément le plus banal et le plus répandu : le carbone.
On ne sait pas exactement comment cette “ chimie cosmique ” a donné naissance aux premières cellules vivantes, mais le processus se résume en deux mots-clés. Le premier est
chimie
. Les êtres vivants fabriquent en continu leurs propres constituants à partir de petits éléments organiques et inorganiques, à l’aide de catalyseurs appelés enzymes et d’énergie tirée de la lumière, des minéraux ou de nourriture créée par d’autres organismes. Aux origines de la vie, les choses se sont passées un peu de cette façon, mais avec des enchaînements, des catalyseurs et des sources d’énergie que nous ne connaissons pas encore.
La communauté scientifique a déjà consacré des efforts considérables à la résolution de ce problème. Nous avons beaucoup appris, sans toutefois trouver de solution. Ce que l’on sait, c’est que les processus en question, étant chimiques, ont dû être déterministes et reproductibles, c’est-à-dire tenus de se produire les conditions nécessaires étant posées. Si la chimie admettait le moindre élément de hasard, il n’y aurait ni laboratoires ni usines chimiques.
Le deuxième mot-clé est
réplication
: la capacité de certaines molécules porteuses d’informations de déclencher la fabrication de copies (complémentaires) d’elles-mêmes par les mécanismes responsables de leur propre synthèse. Cette fonction, aujourd’hui essentiellement celle de l’ADN, était probablement remplie à l’origine par l’ARN, un proche parent de l’ADN.
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Au départ, la réplication ne concernait que les molécules d’ARN. Puis elles ont commencé à synthétiser des protéines, suivant des schémas fournis par l’ARN, et la réplication s’est élargie par ce biais aux protéines. Ensuite, par l’intermédiaire des protéines, des objets de plus en plus complexes ont commencé à se répliquer, pour parvenir enfin aux cellules et aux organismes multicellulaires.
La réplication a permis la reproduction continuelle des mêmes entités, génération après génération. C’est le fondement de la continuité génétique. Par ailleurs, en raison des inévitables défaillances du processus, la réplication a entraîné des mutations, et donc une compétition entre diverses variantes pour des ressources limitées. Conséquence obligatoire, pressentie pour la première fois par Charles Darwin, l’émergence des formes les plus aptes à survivre, et surtout à se reproduire dans les conditions existantes. Ce processus s’est ajouté à la chimie dès l’apparition de la réplication, d’abord pour les molécules, puis pour des assemblages de plus en plus complexes, jusqu’à nos jours.
Avec la réplication, le hasard a fait son apparition, sous forme de variations, ou mutations, soumises au test de la sélection naturelle. D’après tout ce que nous savons, ces variations sont purement accidentelles, totalement dépourvues d’intention ou d’anticipation, d’où l’idée fort répandue que l’histoire de la vie est le fruit de la contingence.
Mais c’est ignorer la possibilité que le hasard ait soumis à la sélection naturelle un éventail de possibilités suffisamment large pour qu’une solution optimale ou quasi-optimale puisse émerger. Dans ce cas, le processus en question serait presque obligatoire, et reproductible dans des conditions données.
De fait, on a de bonnes raisons de penser que cette sélection a eu lieu à l’origine et tout au long de l’évolution de la vie plus qu’on ne le croit généralement. Cela signifie que la vie, dans la mesure où elle est le fruit de processus déterministes et d’une sélection optimisante, a des chances d’apparaître ailleurs sous une forme semblable à celle que nous connaissons, si les conditions semblables à celles qui ont présidé à sa naissance sur Terre sont réunies. D’où l’intérêt que suscitent aujourd’hui les formes de vie extraterrestre.
Cependant, cette sélection tout au long de l’évolution ne prouve en rien l’existence d’un “ dessein intelligent ”. Quels que soient les arguments - amplement réfutés - à l’appui de cette théorie, disons simplement qu’une théorie selon laquelle certaines choses sont inexplicables n’est pas scientifique. Par définition, la science est fondée sur l’idée que l’objet d’étude est explicable. Sinon, pourquoi chercher une explication ? Ce qui est véritablement extraordinaire, c’est tout ce que, dans la nature, et surtout les caractéristiques fondamentales de la vie, nous sommes déjà parvenus à expliquer.
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Not only did Donald Trump win last week’s US presidential election decisively – winning some three million more votes than his opponent, Vice President Kamala Harris – but the Republican Party he now controls gained majorities in both houses on Congress. Given the far-reaching implications of this result – for both US democracy and global stability – understanding how it came about is essential.
By voting for Republican candidates, working-class voters effectively get to have their cake and eat it, expressing conservative moral preferences while relying on Democrats to fight for their basic economic security. The best strategy for Democrats now will be to permit voters to face the consequences of their choice.
urges the party to adopt a long-term strategy aimed at discrediting the MAGA ideology once and for all.
L'idée que les innombrables organismes vivant sur la Terre sont le fruit d’une intervention divine, racontée dans la Bible, n'est pas nouvelle. En dehors des créationnistes durs - attachés à une lecture littérale des Ecritures, et qui sont malheureusement plus nombreux qu’on pourrait s’y attendre - aucune personne douée de raison et informée ne préconise une interprétation aussi stricte du récit biblique de la création. La notion d’intervention divine est toutefois défendue par de nombreux cercles religieux et autres (dont quelques rares scientifiques) adeptes du “ dessein intelligent ”. Selon cette théorie, certaines étapes de l’origine et de l’évolution de la vie sont inexplicables. La plupart des scientifiques la rejettent, car elle ne repose sur aucune preuve crédible et est contraire aux principes scientifiques.
La science donne une version de la Genèse moins pittoresque mais tout aussi extraordinaire que celle de la Bible. La Terre est née, avec le Soleil et les autres planètes, dans un tourbillon de gaz et de poussière, il y a environ 4,5 milliards d’années, soit un peu plus de neuf milliards d’années après le Big Bang. Un demi milliard d’années plus tard, notre planète, enfin remise de cette naissance violente, était physiquement capable d’accueillir la vie. C’est ce qu’elle fit un peu moins de cinq cent millions d’années après, avec LUCA, le "dernier ancêtre commun universel", qui devait donner naissance par le biais de l’évolution à toutes les créatures vivantes, y compris les microbes, les plantes, les champignons, les animaux et les humains.
Les organismes primitifs ont surgi d’une matière minérale, probablement dans des eaux volcaniques chaudes, sulfureuses et chargées de métaux. Cette mixture peu ragoûtante était “ assaisonnée ” de petites molécules organiques : acides aminés, sucres, azote et autres éléments classiques des composants biologiques. L’une des découvertes les plus stupéfiantes des dernières décennies, grâce à l’exploration de l’espace et à l'étude des corps célestes proches, en particulier des météorites tombés sur la Terre, est le fait que beaucoup d’éléments chimiques constitutifs de la vie se forment spontanément dans tout l’univers. La chimie organique, baptisée ainsi parce qu’on la croyait l’apanage des organismes vivants, repose en réalité sur l’élément le plus banal et le plus répandu : le carbone.
On ne sait pas exactement comment cette “ chimie cosmique ” a donné naissance aux premières cellules vivantes, mais le processus se résume en deux mots-clés. Le premier est chimie . Les êtres vivants fabriquent en continu leurs propres constituants à partir de petits éléments organiques et inorganiques, à l’aide de catalyseurs appelés enzymes et d’énergie tirée de la lumière, des minéraux ou de nourriture créée par d’autres organismes. Aux origines de la vie, les choses se sont passées un peu de cette façon, mais avec des enchaînements, des catalyseurs et des sources d’énergie que nous ne connaissons pas encore.
La communauté scientifique a déjà consacré des efforts considérables à la résolution de ce problème. Nous avons beaucoup appris, sans toutefois trouver de solution. Ce que l’on sait, c’est que les processus en question, étant chimiques, ont dû être déterministes et reproductibles, c’est-à-dire tenus de se produire les conditions nécessaires étant posées. Si la chimie admettait le moindre élément de hasard, il n’y aurait ni laboratoires ni usines chimiques.
Le deuxième mot-clé est réplication : la capacité de certaines molécules porteuses d’informations de déclencher la fabrication de copies (complémentaires) d’elles-mêmes par les mécanismes responsables de leur propre synthèse. Cette fonction, aujourd’hui essentiellement celle de l’ADN, était probablement remplie à l’origine par l’ARN, un proche parent de l’ADN.
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La réplication a permis la reproduction continuelle des mêmes entités, génération après génération. C’est le fondement de la continuité génétique. Par ailleurs, en raison des inévitables défaillances du processus, la réplication a entraîné des mutations, et donc une compétition entre diverses variantes pour des ressources limitées. Conséquence obligatoire, pressentie pour la première fois par Charles Darwin, l’émergence des formes les plus aptes à survivre, et surtout à se reproduire dans les conditions existantes. Ce processus s’est ajouté à la chimie dès l’apparition de la réplication, d’abord pour les molécules, puis pour des assemblages de plus en plus complexes, jusqu’à nos jours.
Avec la réplication, le hasard a fait son apparition, sous forme de variations, ou mutations, soumises au test de la sélection naturelle. D’après tout ce que nous savons, ces variations sont purement accidentelles, totalement dépourvues d’intention ou d’anticipation, d’où l’idée fort répandue que l’histoire de la vie est le fruit de la contingence.
Mais c’est ignorer la possibilité que le hasard ait soumis à la sélection naturelle un éventail de possibilités suffisamment large pour qu’une solution optimale ou quasi-optimale puisse émerger. Dans ce cas, le processus en question serait presque obligatoire, et reproductible dans des conditions données.
De fait, on a de bonnes raisons de penser que cette sélection a eu lieu à l’origine et tout au long de l’évolution de la vie plus qu’on ne le croit généralement. Cela signifie que la vie, dans la mesure où elle est le fruit de processus déterministes et d’une sélection optimisante, a des chances d’apparaître ailleurs sous une forme semblable à celle que nous connaissons, si les conditions semblables à celles qui ont présidé à sa naissance sur Terre sont réunies. D’où l’intérêt que suscitent aujourd’hui les formes de vie extraterrestre.
Cependant, cette sélection tout au long de l’évolution ne prouve en rien l’existence d’un “ dessein intelligent ”. Quels que soient les arguments - amplement réfutés - à l’appui de cette théorie, disons simplement qu’une théorie selon laquelle certaines choses sont inexplicables n’est pas scientifique. Par définition, la science est fondée sur l’idée que l’objet d’étude est explicable. Sinon, pourquoi chercher une explication ? Ce qui est véritablement extraordinaire, c’est tout ce que, dans la nature, et surtout les caractéristiques fondamentales de la vie, nous sommes déjà parvenus à expliquer.