MADRID – Le mois prochain, le monde franchira une étape majeure dans le cadre des efforts mondiaux en faveur du développement. L’Assemblée générale des Nations Unies est en effet sur le point d’adopter les Objectifs de développement durable, à savoir un ensemble de cibles ambitieuses à l’échelle internationale, destinées à améliorer l’existence de plusieurs millions d’individus d’ici 2030.
Le fait que les ODD soient fixés en cette année de 70e anniversaire de l’ONU revêt une formidable justesse. Bien que les accomplissements de l’ONU au cours des soixante-dix dernières années n’atteignent pas la perfection, un certain nombre de mesures s’étant en effet révélées inadéquates, les réussites de l’organisation en termes d’implication globale dans la poursuite d’objectifs partagés, tels que le développement, s’avèrent impressionnantes.
En l’an 2000, l’ONU a adopté un programme de développement fondé sur les fameux Objectifs du millénaire pour le développement (OMD), et reposant sur le principe selon lequel nul ne devrait avoir à souffrir des conséquences de l’extrême pauvreté. À l’époque, rares sont ceux qui estimaient que ces objectifs pourraient être atteints d’ici la date cible de 2015. Or, bien que la pauvreté n’ait pas été totalement éradiquée, il convient de relever un certain nombre d’avancées considérables – et plusieurs victoires majeures.
Depuis 1990 (année de référence pour la mesure des améliorations), le nombre d’individus vivant dans l’extrême pauvreté (c’est-à-dire avec moins d’1,25 $ par jour) a diminué de 33 %, passant à travers le monde d’1,9 milliard à 836 millions de personnes, la majeure partie des progrès accomplis ayant fait suite à l’entrée en vigueur des OMD. Par ailleurs, le nombre d’individus ayant accès à l’eau potable a augmenté de 15 % pour atteindre 1,9 milliard. La mortalité infantile a été réduite de plus de moitié, et la mortalité maternelle de 45 %.
De même, le taux d’inscription en école primaire est passé de 83 % à 91 % depuis l’an 2000. Le nombre de nouvelles infections au VIH/sida a chuté de 40 %. Enfin, l’aide publique au développement de la part des pays développés a augmenté de 66 %.
Ces chiffres démontrent combien, au moyen d’objectifs clairement définis et de mesures concrètes, il est possible de générer des changements considérables. Cette philosophie s’est révélée primordiale dans la conception de l’agenda post-2015 pour le développement. Les ODD viennent capitaliser sur la réussite des OMD, tout en y ajoutant une nouvelle dimension : la durabilité. En effet, les dirigeants mondiaux reconnaissent désormais que les efforts fournis en direction du développement ne doivent pas mettre à mal les perspectives des générations futures.
Cette dimension de durabilité s’accompagne d’une universalité qui était absente des OMD. Désormais, les pays développés ne constituent plus seulement des facilitateurs du progrès, qui n’alloueraient qu’un pourcentage de leur PIB afin de soutenir les efforts des pays en voie de développement visant à réduire la pauvreté, à améliorer la santé, et à élever le niveau de vie. Dorénavant, il leur incombe de s’engager en tant que participants actifs à l’effort visant l’accomplissement des objectifs convenus, pour certains en modifiant leurs propres politiques nationales.
C’est en ce sens que les ODD reflètent plus clairement la conviction mise en avant par l’ONU selon laquelle nous sommes tous citoyens du monde. Cette philosophie est à l’origine de l’établissement d’un droit humanitaire international, ainsi que des tribunaux supranationaux chargés de remédier aux violations de ce droit. Elle a également sous-tendu l’adoption du principe de « responsabilité de protéger », qui exige de la communauté internationale qu’elle défende les citoyens d’un pays face à l’atrocité des crimes de masse, lorsque leur propre gouvernement échoue à le faire.
Il est ici question de dignité de la personne. Qui que vous soyez, et quel que soit votre lieu de naissance, vous jouissez d’un droit fondamental à la protection face aux crimes violents de type génocide, ou face aux souffrances indues qu’engendre l’extrême pauvreté. Les générations futures ont droit elles aussi à la dignité de la personne – qui implique le droit de vivre au sein d’un environnement sain et préservé. Le Secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon a mis l’accent sur cette question de dignité de la personne dans le cadre des discussions qui ont conduit à l’adoption des ODD, ayant même demandé au pape François de s’exprimer devant l’Assemblée générale sur ce sujet lors de sa prochaine réunion.
Ainsi, que trouve-t-on précisément dans ce nouvel agenda pour le développement ? Le programme initial, qui a fait l’objet d’un accord au début du mois, énonce 17 objectifs – parmi lesquels l’éradication de la pauvreté sous toutes ses formes, la concrétisation d’une sécurité alimentaire, la promotion de l’agriculture durable, la possibilité d’une éducation de qualité pour tous, la garantie d’un accès à l’énergie et à l’eau potable, ainsi que l’adoption de mesures urgentes dans la lutte contre les changements climatiques – le tout reposant sur 169 cibles.
La réalisation de cet agenda ambitieux exigera la mise en œuvre de mécanismes d’évaluation efficaces, permettant de mettre en lumière les meilleures politiques, et d’assurer un suivi des efforts fournis par les différents pays. En vertu de l’agenda initial, les procédures de contrôle seront menées par les États dans leur individualité, de sorte que chaque gouvernement puisse les façonner en fonction des priorités nationales.
Il incombe toutefois à la communauté internationale de veiller à ce que tous les gouvernements se fixent des objectifs spécifiques, ainsi que des échéances s’y rattachant. À défaut de solides mécanismes de responsabilisation, les ODD ne constitueront rien de plus qu’un exercice de sensibilisation, voyant concrètement la santé, la dignité et la prospérité de toute l’humanité subordonnées aux intérêts nationaux à court terme. Le sommet prochain sur les ODD, qui rassemblera la plus large concentration de chefs d’État et de gouvernement dans toute l’histoire de l’ONU, constitue l’opportunité idéale pour établir de tels mécanismes.
Les ODD se révèlent extrêmement ambitieux. À condition d’un engagement soutenu de la part de tous les États, qu’il s’agisse de pays développés ou en voie de développement, le monde peut espérer célébrer un nouveau pas de géant en 2030.
Traduit de l’anglais par Martin Morel
MADRID – Le mois prochain, le monde franchira une étape majeure dans le cadre des efforts mondiaux en faveur du développement. L’Assemblée générale des Nations Unies est en effet sur le point d’adopter les Objectifs de développement durable, à savoir un ensemble de cibles ambitieuses à l’échelle internationale, destinées à améliorer l’existence de plusieurs millions d’individus d’ici 2030.
Le fait que les ODD soient fixés en cette année de 70e anniversaire de l’ONU revêt une formidable justesse. Bien que les accomplissements de l’ONU au cours des soixante-dix dernières années n’atteignent pas la perfection, un certain nombre de mesures s’étant en effet révélées inadéquates, les réussites de l’organisation en termes d’implication globale dans la poursuite d’objectifs partagés, tels que le développement, s’avèrent impressionnantes.
En l’an 2000, l’ONU a adopté un programme de développement fondé sur les fameux Objectifs du millénaire pour le développement (OMD), et reposant sur le principe selon lequel nul ne devrait avoir à souffrir des conséquences de l’extrême pauvreté. À l’époque, rares sont ceux qui estimaient que ces objectifs pourraient être atteints d’ici la date cible de 2015. Or, bien que la pauvreté n’ait pas été totalement éradiquée, il convient de relever un certain nombre d’avancées considérables – et plusieurs victoires majeures.
Depuis 1990 (année de référence pour la mesure des améliorations), le nombre d’individus vivant dans l’extrême pauvreté (c’est-à-dire avec moins d’1,25 $ par jour) a diminué de 33 %, passant à travers le monde d’1,9 milliard à 836 millions de personnes, la majeure partie des progrès accomplis ayant fait suite à l’entrée en vigueur des OMD. Par ailleurs, le nombre d’individus ayant accès à l’eau potable a augmenté de 15 % pour atteindre 1,9 milliard. La mortalité infantile a été réduite de plus de moitié, et la mortalité maternelle de 45 %.
De même, le taux d’inscription en école primaire est passé de 83 % à 91 % depuis l’an 2000. Le nombre de nouvelles infections au VIH/sida a chuté de 40 %. Enfin, l’aide publique au développement de la part des pays développés a augmenté de 66 %.
Ces chiffres démontrent combien, au moyen d’objectifs clairement définis et de mesures concrètes, il est possible de générer des changements considérables. Cette philosophie s’est révélée primordiale dans la conception de l’agenda post-2015 pour le développement. Les ODD viennent capitaliser sur la réussite des OMD, tout en y ajoutant une nouvelle dimension : la durabilité. En effet, les dirigeants mondiaux reconnaissent désormais que les efforts fournis en direction du développement ne doivent pas mettre à mal les perspectives des générations futures.
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Cette dimension de durabilité s’accompagne d’une universalité qui était absente des OMD. Désormais, les pays développés ne constituent plus seulement des facilitateurs du progrès, qui n’alloueraient qu’un pourcentage de leur PIB afin de soutenir les efforts des pays en voie de développement visant à réduire la pauvreté, à améliorer la santé, et à élever le niveau de vie. Dorénavant, il leur incombe de s’engager en tant que participants actifs à l’effort visant l’accomplissement des objectifs convenus, pour certains en modifiant leurs propres politiques nationales.
C’est en ce sens que les ODD reflètent plus clairement la conviction mise en avant par l’ONU selon laquelle nous sommes tous citoyens du monde. Cette philosophie est à l’origine de l’établissement d’un droit humanitaire international, ainsi que des tribunaux supranationaux chargés de remédier aux violations de ce droit. Elle a également sous-tendu l’adoption du principe de « responsabilité de protéger », qui exige de la communauté internationale qu’elle défende les citoyens d’un pays face à l’atrocité des crimes de masse, lorsque leur propre gouvernement échoue à le faire.
Il est ici question de dignité de la personne. Qui que vous soyez, et quel que soit votre lieu de naissance, vous jouissez d’un droit fondamental à la protection face aux crimes violents de type génocide, ou face aux souffrances indues qu’engendre l’extrême pauvreté. Les générations futures ont droit elles aussi à la dignité de la personne – qui implique le droit de vivre au sein d’un environnement sain et préservé. Le Secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon a mis l’accent sur cette question de dignité de la personne dans le cadre des discussions qui ont conduit à l’adoption des ODD, ayant même demandé au pape François de s’exprimer devant l’Assemblée générale sur ce sujet lors de sa prochaine réunion.
Ainsi, que trouve-t-on précisément dans ce nouvel agenda pour le développement ? Le programme initial, qui a fait l’objet d’un accord au début du mois, énonce 17 objectifs – parmi lesquels l’éradication de la pauvreté sous toutes ses formes, la concrétisation d’une sécurité alimentaire, la promotion de l’agriculture durable, la possibilité d’une éducation de qualité pour tous, la garantie d’un accès à l’énergie et à l’eau potable, ainsi que l’adoption de mesures urgentes dans la lutte contre les changements climatiques – le tout reposant sur 169 cibles.
La réalisation de cet agenda ambitieux exigera la mise en œuvre de mécanismes d’évaluation efficaces, permettant de mettre en lumière les meilleures politiques, et d’assurer un suivi des efforts fournis par les différents pays. En vertu de l’agenda initial, les procédures de contrôle seront menées par les États dans leur individualité, de sorte que chaque gouvernement puisse les façonner en fonction des priorités nationales.
Il incombe toutefois à la communauté internationale de veiller à ce que tous les gouvernements se fixent des objectifs spécifiques, ainsi que des échéances s’y rattachant. À défaut de solides mécanismes de responsabilisation, les ODD ne constitueront rien de plus qu’un exercice de sensibilisation, voyant concrètement la santé, la dignité et la prospérité de toute l’humanité subordonnées aux intérêts nationaux à court terme. Le sommet prochain sur les ODD, qui rassemblera la plus large concentration de chefs d’État et de gouvernement dans toute l’histoire de l’ONU, constitue l’opportunité idéale pour établir de tels mécanismes.
Les ODD se révèlent extrêmement ambitieux. À condition d’un engagement soutenu de la part de tous les États, qu’il s’agisse de pays développés ou en voie de développement, le monde peut espérer célébrer un nouveau pas de géant en 2030.
Traduit de l’anglais par Martin Morel