AUBURN, ALABAMA – Selon les Nations Unies, autour de 2050, la population d’humains sur la planète frôlera le dix milliards, un seuil qui mettra à rude épreuve beaucoup des systèmes du monde les plus importants, en particulier l’agriculture. Comment les agriculteurs — y compris les cultivateurs démunis des pays en développement — augmenteront-ils la productivité des cultures pour satisfaire la demande croissante de nourriture ?
Nourrir la planète entière de façon efficace sera une tâche ardue, et des facteurs intangibles comme les changements climatiques, les conflits violents et l’accès à de l’eau potable viendront compliquer les choses. De nouvelles techniques agraires qui font appel à des données et à des drones pour contrôler l’état de santé des cultures aideront certainement. Mais l’une des méthodes les plus porteuses pour accroître les rendements pérennes viendra de l’exploitation de ce qui est déjà dans le sol.
Des microbes qui se retrouvent naturellement dans les sols favorisent la santé des cultures, se traduisant par une plus grande production agricole. Mais la mauvaise gestion des sols peut entraîner une perte de contenu microbien. Grâce à ces microorganismes bénéfiques qui régénèrent les sols appauvris, la productivité des exploitations agricoles peut être accrue, sans faire appel à des intrants coûteux comme des engrais et des insecticides, permettant ainsi de relever l’énorme défi de nourrir une population croissante tout en protégeant l’environnement.
Plusieurs jeunes entreprises œuvrent déjà pour mettre en valeur l’efficacité des microbes. Sise à San Francisco, la société Biome Makers se sert ainsi du séquençage ADN pour que les viticulteurs tirent avantage des microorganismes pour améliorer la qualité et augmenter le rendement des vignobles. Indigo, une entreprise de Boston spécialisée dans l’utilisation des technologies dans l’agriculture, conçoit des produits microbiens qui aident les plantes à résister aux conditions de sécheresse. Et en Floride, Pathway Biologic met au point des produits microbiens utilisés dans tous les secteurs de l’agriculture.
Les grandes sociétés ne sont pas en reste non plus. Bayer Crop Sciences, par exemple, commercialise plusieurs produits à base microbienne, dont un qui bonifierait de 15 % le rendement de la culture du maïs. Beaucoup d’autres sociétés sont en train de mettre au point des produits similaires qui devraient bientôt arriver sur le marché.
Évidemment, les universités participent aussi activement aux recherches liées aux agents microbiens. À l’Université Auburn, par exemple, je fais partie de l’équipe de recherche qui évalue les effets de la flore microbienne des sols sur la croissance et la capacité d’adaptation des plants de maïs et de coton. Comme j’ai pu l’observer dans mes propres travaux, les plants de maïs cultivés dans un sol imprégné de certaines bactéries développent des systèmes radiculaires dont le volume est le triple de celui des plantes cultivées dans des sols non traités. J’ai également observé comment ces bactéries protègent les récoltes de la sécheresse ; dans une des expériences, nous avons coupé l’irrigation d’un groupe de plants ayant reçu le traitement microbien et d’un groupe témoin. Après cinq jours sans eau, les plants traités étaient bien droits et solides, tandis que les plants non traités étaient fanés et flétris.
At a time when democracy is under threat, there is an urgent need for incisive, informed analysis of the issues and questions driving the news – just what PS has always provided. Subscribe now and save $50 on a new subscription.
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Les agriculteurs trouvent particulièrement attrayants les produits microbiens parce qu’ils sont formulés à partir d’organismes déjà présents dans la nature qui ne comportent pas les mêmes risques que les produits chimiques de synthèse. La valeur du marché actuel de ces produits naturels est de 2,3 milliards $ et devrait atteindre 5 milliards $ d’ici les quatre prochaines années.
Il est presque impossible de surestimer les avantages du traitement microbien des sols pour la productivité agraire, surtout dans le monde en développement, où l’accroissement du rendement des cultures est une question de survie pour les petites exploitations agricoles. Ceci est particulièrement vrai pour les petits agriculteurs en Afrique.
Aujourd’hui, environ 65 % des sols de l’Afrique sont dégradés, dépourvus des nutriments et de la vie microbienne nécessaires au maintien de la santé des plantes. Les agriculteurs africains dépensent 68 milliards $ par an pour renverser ces tendances, principalement par l’application d’engrais chimique. Les solutions à base de microbes pourraient donc aider à améliorer la qualité des sols de façon plus durable que les techniques traditionnelles, permettant aux agriculteurs africains de cultiver les récoltes dont la population du continent a besoin pour s’alimenter.
Pourtant les recherches africaines sur la flore microbienne des sols demeurent limitées, la plupart des solutions microbiennes étant mises au point pour les marchés des pays développés. Il faut changer cet état des choses. Plus d’investissements pourraient donner les moyens aux scientifiques de découvrir de nouvelles souches microbiennes dotées de propriétés uniques influant sur la santé des sols et des récoltes localement, tirant parti du propre environnement naturel de l’Afrique pour améliorer la productivité agricole.
Des investissements accrus en recherche sur les sols pourraient générer des retombées pour les économies africaines. Les nouvelles découvertes menant à des brevets et des licences, ainsi que les recherches en découlant pourraient stimuler la formation de nouvelles entreprises agroalimentaires et l’avènement de nouveaux secteurs agricoles.
Je peux personnellement témoigner de l’ampleur des retombées de ce type de recherches. Mes propres travaux sur la flore microbienne des sols à Auburn ont mené à l’octroi de trois brevets américains, et plusieurs sociétés agricoles ont acheté les droits de commercialisation des produits issus de la technologie. D’autres demandes de brevets issues de mes recherches ont été déposées dans d’autres pays, dont l’Argentine, la Bolivie, le Paraguay, l’Uruguay et le Venezuela. Une fois les brevets acceptés, des millions d’agriculteurs pourraient en tirer avantage des technologies développées qui mènent à des produits commerciaux générant de nouvelles sources rentables de revenus.
Combler la demande de nourriture de la population croissante de la planète nécessitera de nouveaux produits, de nouvelles technologies et pratiques agricoles pour accroître la productivité. Des solutions résultant de microbes bénéfiques seront la clé de ces innovations. Pour des chercheurs en agriculture comme moi, il n’y a pas de question plus importante que la sécurité alimentaire des générations futures. Il est néanmoins très encourageant de savoir qu’à mesure que nous recherchons de nouvelles méthodes d’optimisation de la culture des plantes, les technologies les plus prometteuses sont naturelles, en dormance dans le sol sous nos pieds, n’attendant que le jour où elles seront découvertes.
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Though US President Joe Biden’s massive industrial-subsidy programs have fueled a construction boom, they have failed to revive US manufacturing output – a goal that Donald Trump’s tariff-based approach will also fail to achieve. In the US and the EU alike, resisting the secular trend of “de-manufacturing” may well be a losing battle.
shows that Joe Biden’s subsidies failed to boost industrial production – and Donald Trump’s tariffs will, too.
Rather than use “normal” policy tools, such as interest rates and fiscal spending, to address low consumption or deflationary pressures, Chinese policymakers should be pursuing fundamental reforms that address the issues underlying these problems. The key is to allow for a more market-driven allocation of land, money, and labor.
concludes that, with fundamental reforms, another wave of rapid economic growth is possible.
AUBURN, ALABAMA – Selon les Nations Unies, autour de 2050, la population d’humains sur la planète frôlera le dix milliards, un seuil qui mettra à rude épreuve beaucoup des systèmes du monde les plus importants, en particulier l’agriculture. Comment les agriculteurs — y compris les cultivateurs démunis des pays en développement — augmenteront-ils la productivité des cultures pour satisfaire la demande croissante de nourriture ?
Nourrir la planète entière de façon efficace sera une tâche ardue, et des facteurs intangibles comme les changements climatiques, les conflits violents et l’accès à de l’eau potable viendront compliquer les choses. De nouvelles techniques agraires qui font appel à des données et à des drones pour contrôler l’état de santé des cultures aideront certainement. Mais l’une des méthodes les plus porteuses pour accroître les rendements pérennes viendra de l’exploitation de ce qui est déjà dans le sol.
Des microbes qui se retrouvent naturellement dans les sols favorisent la santé des cultures, se traduisant par une plus grande production agricole. Mais la mauvaise gestion des sols peut entraîner une perte de contenu microbien. Grâce à ces microorganismes bénéfiques qui régénèrent les sols appauvris, la productivité des exploitations agricoles peut être accrue, sans faire appel à des intrants coûteux comme des engrais et des insecticides, permettant ainsi de relever l’énorme défi de nourrir une population croissante tout en protégeant l’environnement.
Plusieurs jeunes entreprises œuvrent déjà pour mettre en valeur l’efficacité des microbes. Sise à San Francisco, la société Biome Makers se sert ainsi du séquençage ADN pour que les viticulteurs tirent avantage des microorganismes pour améliorer la qualité et augmenter le rendement des vignobles. Indigo, une entreprise de Boston spécialisée dans l’utilisation des technologies dans l’agriculture, conçoit des produits microbiens qui aident les plantes à résister aux conditions de sécheresse. Et en Floride, Pathway Biologic met au point des produits microbiens utilisés dans tous les secteurs de l’agriculture.
Les grandes sociétés ne sont pas en reste non plus. Bayer Crop Sciences, par exemple, commercialise plusieurs produits à base microbienne, dont un qui bonifierait de 15 % le rendement de la culture du maïs. Beaucoup d’autres sociétés sont en train de mettre au point des produits similaires qui devraient bientôt arriver sur le marché.
Évidemment, les universités participent aussi activement aux recherches liées aux agents microbiens. À l’Université Auburn, par exemple, je fais partie de l’équipe de recherche qui évalue les effets de la flore microbienne des sols sur la croissance et la capacité d’adaptation des plants de maïs et de coton. Comme j’ai pu l’observer dans mes propres travaux, les plants de maïs cultivés dans un sol imprégné de certaines bactéries développent des systèmes radiculaires dont le volume est le triple de celui des plantes cultivées dans des sols non traités. J’ai également observé comment ces bactéries protègent les récoltes de la sécheresse ; dans une des expériences, nous avons coupé l’irrigation d’un groupe de plants ayant reçu le traitement microbien et d’un groupe témoin. Après cinq jours sans eau, les plants traités étaient bien droits et solides, tandis que les plants non traités étaient fanés et flétris.
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Les agriculteurs trouvent particulièrement attrayants les produits microbiens parce qu’ils sont formulés à partir d’organismes déjà présents dans la nature qui ne comportent pas les mêmes risques que les produits chimiques de synthèse. La valeur du marché actuel de ces produits naturels est de 2,3 milliards $ et devrait atteindre 5 milliards $ d’ici les quatre prochaines années.
Il est presque impossible de surestimer les avantages du traitement microbien des sols pour la productivité agraire, surtout dans le monde en développement, où l’accroissement du rendement des cultures est une question de survie pour les petites exploitations agricoles. Ceci est particulièrement vrai pour les petits agriculteurs en Afrique.
Aujourd’hui, environ 65 % des sols de l’Afrique sont dégradés, dépourvus des nutriments et de la vie microbienne nécessaires au maintien de la santé des plantes. Les agriculteurs africains dépensent 68 milliards $ par an pour renverser ces tendances, principalement par l’application d’engrais chimique. Les solutions à base de microbes pourraient donc aider à améliorer la qualité des sols de façon plus durable que les techniques traditionnelles, permettant aux agriculteurs africains de cultiver les récoltes dont la population du continent a besoin pour s’alimenter.
Pourtant les recherches africaines sur la flore microbienne des sols demeurent limitées, la plupart des solutions microbiennes étant mises au point pour les marchés des pays développés. Il faut changer cet état des choses. Plus d’investissements pourraient donner les moyens aux scientifiques de découvrir de nouvelles souches microbiennes dotées de propriétés uniques influant sur la santé des sols et des récoltes localement, tirant parti du propre environnement naturel de l’Afrique pour améliorer la productivité agricole.
Des investissements accrus en recherche sur les sols pourraient générer des retombées pour les économies africaines. Les nouvelles découvertes menant à des brevets et des licences, ainsi que les recherches en découlant pourraient stimuler la formation de nouvelles entreprises agroalimentaires et l’avènement de nouveaux secteurs agricoles.
Je peux personnellement témoigner de l’ampleur des retombées de ce type de recherches. Mes propres travaux sur la flore microbienne des sols à Auburn ont mené à l’octroi de trois brevets américains, et plusieurs sociétés agricoles ont acheté les droits de commercialisation des produits issus de la technologie. D’autres demandes de brevets issues de mes recherches ont été déposées dans d’autres pays, dont l’Argentine, la Bolivie, le Paraguay, l’Uruguay et le Venezuela. Une fois les brevets acceptés, des millions d’agriculteurs pourraient en tirer avantage des technologies développées qui mènent à des produits commerciaux générant de nouvelles sources rentables de revenus.
Combler la demande de nourriture de la population croissante de la planète nécessitera de nouveaux produits, de nouvelles technologies et pratiques agricoles pour accroître la productivité. Des solutions résultant de microbes bénéfiques seront la clé de ces innovations. Pour des chercheurs en agriculture comme moi, il n’y a pas de question plus importante que la sécurité alimentaire des générations futures. Il est néanmoins très encourageant de savoir qu’à mesure que nous recherchons de nouvelles méthodes d’optimisation de la culture des plantes, les technologies les plus prometteuses sont naturelles, en dormance dans le sol sous nos pieds, n’attendant que le jour où elles seront découvertes.
Traduit de l’anglais par Pierre Castegnier