SEATTLE – Depuis le dernier quart du XXème siècle, la température moyenne à la surface de la terre a monté inexorablement. Puis à la surprise des scientifiques, il s'est arrêté. La concentration de dioxyde de carbone dans l'atmosphère de la terre a continué d'augmenter. En effet, elle est plus élevée aujourd'hui qu'elle ne l'a été pendant des siècles. Et pourtant, depuis les 15 dernières années, selon la manière traditionnelle de mesurer le réchauffement climatique, la planète ne semble pas s'être réchauffée.
Comment expliquer cette tournure inattendue des événements ? Qu'est-ce que cela signifie pour la future politique climatique ?
La pause dans la hausse des températures de surface est réelle. On peut l'observer dans les sondages de la surface de la mer et dans les mesures satellites de la troposphère. Mais la raison pour laquelle elle s'est produite n'est pas que nos émissions de gaz à effet de serre (GES) ne modifient plus le climat de la Terre. C'est que la température de surface est un mauvais indicateur du réchauffement anthropique. En effet, ce que les scientifiques ont compris, c'est qu'au lieu de réchauffer la surface, l'excès de chaleur s'est déplacé vers les plus grandes profondeurs océaniques.
Cela remet en question certaines stratégies internationales de lutte contre le changement climatique actuellement en cours de négociation, comme celles visant à empêcher la température mondiale à la surface de la terre d'augmenter de plus de 2º Celsius au-dessus de la moyenne pré-industrielle.
Les scientifiques n'ont probablement pas transmis de manière adéquate à l'opinion publique que leurs projections sur le réchauffement futur sont fondées sur des modèles qui ne représentent que la soi-disant « réponse forcée » des températures moyennes mondiales de surface, autrement dit le changement provoqué par les émissions de GES. Mais ce qui est observé à la surface comprend des variations non forcées ou naturelles, comme les fluctuations de El Niño et La Niña d'une année sur l'autre et le cycle de 60 à 70 ans à partir des fluctuations de la circulation thermohaline dans l'Atlantique.
En fait, on pense à présent que ce cycle enfouit périodiquement la chaleur profondément dans les océans. Et parce qu'il existait avant même que l'homme ait mis une quantité significative de carbone dans l'atmosphère, il est probablement naturel.
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Étant donné l'importante capacité de stockage de chaleur des océans, il est très difficile de déterminer quelle quantité de réchauffement se maintient à la surface au cours des décennies. Bien que l'on commence à se rendre compte de l'ampleur du défi, les projections actuelles redoutées du réchauffement de deux degrés doivent encore prendre en compte les cycles océaniques variables.
Evidemment, les températures de surface restent importantes. Elles sont une meilleure mesure pour les menaces causées par le changement climatique, par rapport à la chaleur confinée sous-marine. Mais certaines des menaces que les scientifiques (et les économistes) déduisent de la température de surface reflètent également le changement climatique naturel et donc ne peuvent pas être atténuées via la réduction des émissions de CO2.
La quantité totale de chaleur contenue dans les océans répond à l'évolution des émissions et est donc une méthode de mesure plus appropriée évaluer de telles réponses. En effet, elle a continué à se réchauffer comme prévu, alors même que la température de surface a cessé d'augmenter.
Le contenu de chaleur des océans est mesuré par un réseau de plus de 3 000 flotteurs dérivants libres robotisés répartis à travers les eaux du globe, où ils plongent régulièrement à 2 000 mètres sous la surface. La température qu'ils mesurent est transmise à des satellites en orbite et est disponible publiquement en ligne, en temps quasi-réel. Pour faciliter l'interprétation, la teneur en chaleur des océans peut facilement être convertie en température moyenne après division par une constante. Au fil du temps, ces modèles pourraient démontrer comment relier cette nouvelle mesure mondiale à l'impact sur le climat des émissions régionales.
La recherche scientifique intensive pour une explication de la pause dans le réchauffement climatique à la surface de la Terre a conduit à une meilleure compréhension de la complexité du fonctionnement du climat. Cela confirme la théorie de longue date selon laquelle la Terre dispose d'un budget d'énergie affecté par les perturbations radiatives au sommet de l'atmosphère, bien que le partitionnement de l'énergie entre la surface et les plus grandes profondeurs océaniques reste difficile.
Personne ne sait combien de temps va durer la pause actuelle. Néanmoins à un certain point, les cycles naturels vont se modifier. Les océans vont cesser d'absorber la majeure partie du réchauffement de la planète et les températures de surface vont recommencer à grimper. A ce moment-là, nous pouvons nous attendre à ce que cette augmentation reprenne le rythme rapide observé à la fin du XXème siècle, lorsque la température de surface a augmenté d'environ 0,17 degrés Celsius tous les dix ans.
En attendant, on ne sait toujours pas si le risque global pour l'environnement a été réduit par la pause. Certains prétendent que ce qui a baissé finira par remonter. Le ballottement d'avant en arrière des eaux chaudes et froides (El Niño et La Niña) sur la couche superficielle de l'océan Pacifique équatorial va continuer à produire des fluctuations de températures de surface chaque année. Cependant sur de plus longues périodes, le risque que la chaleur actuellement stockée dans l'océan profond refasse surface est peu probable.
Mais une chose est sûre : surveiller les températures de surface ne nous donne pas une représentation assez précise du réchauffement climatique anthropique. Tant que nous n'aurons pas une compréhension claire de la relation entre nos émissions cumulatives de GES et la température de la Terre, il sera toujours difficile d'évaluer le potentiel de dégâts matériels liés aux changements climatiques causés par l'homme ou de développer les bonnes stratégies pour le minimiser.
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At the end of a year of domestic and international upheaval, Project Syndicate commentators share their favorite books from the past 12 months. Covering a wide array of genres and disciplines, this year’s picks provide fresh perspectives on the defining challenges of our time and how to confront them.
ask Project Syndicate contributors to select the books that resonated with them the most over the past year.
SEATTLE – Depuis le dernier quart du XXème siècle, la température moyenne à la surface de la terre a monté inexorablement. Puis à la surprise des scientifiques, il s'est arrêté. La concentration de dioxyde de carbone dans l'atmosphère de la terre a continué d'augmenter. En effet, elle est plus élevée aujourd'hui qu'elle ne l'a été pendant des siècles. Et pourtant, depuis les 15 dernières années, selon la manière traditionnelle de mesurer le réchauffement climatique, la planète ne semble pas s'être réchauffée.
Comment expliquer cette tournure inattendue des événements ? Qu'est-ce que cela signifie pour la future politique climatique ?
La pause dans la hausse des températures de surface est réelle. On peut l'observer dans les sondages de la surface de la mer et dans les mesures satellites de la troposphère. Mais la raison pour laquelle elle s'est produite n'est pas que nos émissions de gaz à effet de serre (GES) ne modifient plus le climat de la Terre. C'est que la température de surface est un mauvais indicateur du réchauffement anthropique. En effet, ce que les scientifiques ont compris, c'est qu'au lieu de réchauffer la surface, l'excès de chaleur s'est déplacé vers les plus grandes profondeurs océaniques.
Cela remet en question certaines stratégies internationales de lutte contre le changement climatique actuellement en cours de négociation, comme celles visant à empêcher la température mondiale à la surface de la terre d'augmenter de plus de 2º Celsius au-dessus de la moyenne pré-industrielle.
Les scientifiques n'ont probablement pas transmis de manière adéquate à l'opinion publique que leurs projections sur le réchauffement futur sont fondées sur des modèles qui ne représentent que la soi-disant « réponse forcée » des températures moyennes mondiales de surface, autrement dit le changement provoqué par les émissions de GES. Mais ce qui est observé à la surface comprend des variations non forcées ou naturelles, comme les fluctuations de El Niño et La Niña d'une année sur l'autre et le cycle de 60 à 70 ans à partir des fluctuations de la circulation thermohaline dans l'Atlantique.
En fait, on pense à présent que ce cycle enfouit périodiquement la chaleur profondément dans les océans. Et parce qu'il existait avant même que l'homme ait mis une quantité significative de carbone dans l'atmosphère, il est probablement naturel.
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Evidemment, les températures de surface restent importantes. Elles sont une meilleure mesure pour les menaces causées par le changement climatique, par rapport à la chaleur confinée sous-marine. Mais certaines des menaces que les scientifiques (et les économistes) déduisent de la température de surface reflètent également le changement climatique naturel et donc ne peuvent pas être atténuées via la réduction des émissions de CO2.
La quantité totale de chaleur contenue dans les océans répond à l'évolution des émissions et est donc une méthode de mesure plus appropriée évaluer de telles réponses. En effet, elle a continué à se réchauffer comme prévu, alors même que la température de surface a cessé d'augmenter.
Le contenu de chaleur des océans est mesuré par un réseau de plus de 3 000 flotteurs dérivants libres robotisés répartis à travers les eaux du globe, où ils plongent régulièrement à 2 000 mètres sous la surface. La température qu'ils mesurent est transmise à des satellites en orbite et est disponible publiquement en ligne, en temps quasi-réel. Pour faciliter l'interprétation, la teneur en chaleur des océans peut facilement être convertie en température moyenne après division par une constante. Au fil du temps, ces modèles pourraient démontrer comment relier cette nouvelle mesure mondiale à l'impact sur le climat des émissions régionales.
La recherche scientifique intensive pour une explication de la pause dans le réchauffement climatique à la surface de la Terre a conduit à une meilleure compréhension de la complexité du fonctionnement du climat. Cela confirme la théorie de longue date selon laquelle la Terre dispose d'un budget d'énergie affecté par les perturbations radiatives au sommet de l'atmosphère, bien que le partitionnement de l'énergie entre la surface et les plus grandes profondeurs océaniques reste difficile.
Personne ne sait combien de temps va durer la pause actuelle. Néanmoins à un certain point, les cycles naturels vont se modifier. Les océans vont cesser d'absorber la majeure partie du réchauffement de la planète et les températures de surface vont recommencer à grimper. A ce moment-là, nous pouvons nous attendre à ce que cette augmentation reprenne le rythme rapide observé à la fin du XXème siècle, lorsque la température de surface a augmenté d'environ 0,17 degrés Celsius tous les dix ans.
En attendant, on ne sait toujours pas si le risque global pour l'environnement a été réduit par la pause. Certains prétendent que ce qui a baissé finira par remonter. Le ballottement d'avant en arrière des eaux chaudes et froides (El Niño et La Niña) sur la couche superficielle de l'océan Pacifique équatorial va continuer à produire des fluctuations de températures de surface chaque année. Cependant sur de plus longues périodes, le risque que la chaleur actuellement stockée dans l'océan profond refasse surface est peu probable.
Mais une chose est sûre : surveiller les températures de surface ne nous donne pas une représentation assez précise du réchauffement climatique anthropique. Tant que nous n'aurons pas une compréhension claire de la relation entre nos émissions cumulatives de GES et la température de la Terre, il sera toujours difficile d'évaluer le potentiel de dégâts matériels liés aux changements climatiques causés par l'homme ou de développer les bonnes stratégies pour le minimiser.