NEW YORK – Peu de pays ont autant intérêt que l'Australie à s'attaquer au changement climatique. Pourtant le gouvernement conservateur actuel de l'Australie refuse de prendre les mesures nécessaires pour répondre aux injonctions de la science climatique : réduire les émissions de gaz à effet de serre et donc jouer son rôle de membre responsable au sein de la communauté internationale. Au lieu de cela, nous, Australiens, vivons à présent aux dépens du reste du monde.
Le gouvernement australien n'écoute pas la communauté internationale des affaires, malgré le fait que les investisseurs responsables de 2,4 milliards de dollars d'actifs se sont récemment engagés à évoluer vers des portefeuilles neutres en carbone d'ici 2050. Ce gouvernement est également en décalage avec le leadership de la défense de l'Australie, qui reconnaît la menace que représente le changement climatique pour la sécurité mondiale, ainsi que la pression croissante causée par des missions permanentes de secours en cas de catastrophe dans la région. Il manque de respect envers l'opinion publique, en particulier envers la jeunesse, dont une grande partie commence à redouter ce monde dont elle va hériter.
Selon l'organisme scientifique national australien, l'Organisation de recherche scientifique et industrielle du Commonwealth, notre climat s'est déjà réchauffé de 1°C depuis 1910. Notre total de précipitations du milieu de l'année a diminué de 20 % depuis les années 1970 dans certaines régions du pays. Nos exploitants agricoles sont confrontés à des sécheresses 20 % plus longues, qui se prolongent et intensifient les saisons de feux de brousse. Le coût économique des catastrophes naturelles est déjà énorme : 182 milliards de dollars dans la décennie qui a précédé 2016, selon Deloitte Access Economics. Le niveau des mers devrait monter d'environ un mètre (39,4 pouces) d'ici 2100, mettant ainsi en péril 35 000 kilomètres (22 000 miles) de routes côtières et d'infrastructures ferroviaires. Non seulement les catastrophes naturelles coûtent des vies, détruisent des foyers et ruinent des ménages. Mais encore, elles font fermer des ports, mettent en péril des consortiums d'assurance, dévastent la production alimentaire et font exploser les budgets publics.
Inversement, la transition vers un avenir plus propre, en cas de bonne gestion, pourrait être une aubaine économique pour l'Australie. Nos importantes ressources en gaz naturel représentent une option plus propre pour effectuer cette transition depuis le charbon et le pétrole. Il existe un potentiel énorme pour la production d'électricité solaire sur notre vaste territoire baingé de soleil, à l'heure où les coûts de l'énergie solaire sont en train de baisser. Il en va de même pour l'énergie éolienne, du fait de notre long littoral et de notre vaste territoire. Nos scientifiques, nos chercheurs et entrepreneurs en énergie renouvelables disposent d'une d'expertise exportable considérable.
Plutôt que de réduire ses émissions, l'Australie augmente son empreinte carbone nationale en moyenne de 1 % par an depuis que mon gouvernement a quitté le pouvoir en 2013. En effet, nous prenons le chemin d'une augmentation de 8 % (par rapport aux niveaux de 2005), d'ici 2030. En revanche, le World Resources Instituteprédit que près de 60 pays représentant plus de 60 % des émissions, dont la Chine, auront déjà atteint des pics d'émissions à cette date. Cette donnée à elle seule ruine l'argument coutumier des conservateurs australiens, selon lequel l'Australie ne doit pas agir, parce que la Chine n'a rien fait.
L'objectif national d'émissions adopté par le gouvernement conservateur australien en 2015 prévoit une réduction de 26 à 28 % d'ici 2030, mais cet objectif est fallacieux. Le gouvernement du Premier ministre d'alors Tony Abbott l'a choisi parce qu'il reflétait la prévision du Président américain Barack Obama d'une réduction de 26 à 28 % des émissions américaines d'ici 2025. Abbott a prétendu à tort que son objectif était « le même que celui des États-Unis », alors qu'il savait très bien que l'objectif d'Obama représentait une réduction beaucoup plus importante de 41 % si on devait le maintenir jusqu'en 2030. Abbott a été aidé par les médias complices et négationnistes climatiques détenus par Rupert Murdoch, qui ont renforcé le mensonge.
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Malgré cet objectif déjà revu à la baisse, le Premier ministre conservateur actuel de l'Australie, Scott Morrison, s'appuie à présent sur un tour de passe-passe comptable douteux pour atteindre cet objectif, en utilisant des « crédits supplémentaires » pour faire face à la « surréalisation » de l'Australie relativement au Protocole de Kyoto, dont la plus grande partie a eu lieu sous mon gouvernement.
Quelles mesures auraient donc pu proposer des gouvernements australiens plus responsables ? Voici cinq idées concrètes. Premièrement, l'Australie aurait pu s'engager à revoir correctement son objectif climatique de 2015, qui était conforme à l'esprit et à la lettre de l'Accord de Paris. Si le nouveau système d'hydroélectricité tant vanté du gouvernement (Snowy Hydro 2.0) est vraiment aussi prometteur qu'on le dit, revoir nos ambitions nationales à la hausse ne devrait pas poser problème.
Deuxièmement, l'Australie aurait pu laisser tomber ce tour de passe-passe grossier sur les crédits de Kyoto inutilisés. Cette arnaque - que nos voisins du Pacifique détestent - est à présent utilisée par d'autres pays pour attaquer l'Australie sur la scène mondiale.
Troisièmement, l'Australie aurait pu mettre en place un calendrier pour une stratégie de décarbonisation à long terme, comme invite à le faire l'Accord de Paris. Ce travail devrait déjà être bien avancé, étant donné que le gouvernement l'a promis pour l'an prochain.
Quatrièmement, dans le cadre de cette stratégie, l'Australie aurait pu s'engager à atteindre zéro émission nette de gaz à effet de serre d'ici 2050, puis faire marche arrière à partir de là. Le Royaume-Uni et la Nouvelle-Zélande l'ont déjà fait, ainsi que 60 autres pays et trois États australiens.
Enfin, nous aurions pu suivre l'exemple du Royaume-Uni, de la France et d'autres pays en proposant de reconstituer le Fonds vert pour le climat, plutôt que de reformuler d'anciens engagements, qui vont imposer cette charge à des pays nécessiteux en les rendant directement applicables à nous plutôt qu'à une seule source mondiale.
Malheureusement, le gouvernement australien n'a rien fait de tout cela. Au lieu de cela, il a fermé les yeux pendant que nos exploitants agricoles se battent pour survivre, pendant que la Grande barrière de corail se meurt et que des catastrophes naturelles plus féroces encore tuent nos populations.
L'opposition de l'Australie - le Parti travailliste - est en train d'examiner officiellement ses politiques climatiques après sa défaite aux élections de mai dernier. Malgré les fulminations de l'extrême droite et de la fausse gauche, cette introspection est tout à fait normale. L'extrême droite n'a aucun intérêt à mener une action climatique et le Parti Vert de la fausse gauche a toujours été le parfait ennemi du bien. Personne en Australie n'oubliera jamais que le Parti Vert a rejoint les rangs des conservateurs pour vaincre la législation de mon gouvernement sur les régimes d'échange de droits d'émission au Sénat. S'ils n'avaient pas agi ainsi, l'Australie serait déjà dotée d'une tarification du carbone depuis une décennie - et serait bien plus proche d'un avenir à faibles émissions en carbone.
Les Australiens méritent mieux que cela. Tout comme la prochaine génération. Tout comme notre planète.
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At the end of a year of domestic and international upheaval, Project Syndicate commentators share their favorite books from the past 12 months. Covering a wide array of genres and disciplines, this year’s picks provide fresh perspectives on the defining challenges of our time and how to confront them.
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NEW YORK – Peu de pays ont autant intérêt que l'Australie à s'attaquer au changement climatique. Pourtant le gouvernement conservateur actuel de l'Australie refuse de prendre les mesures nécessaires pour répondre aux injonctions de la science climatique : réduire les émissions de gaz à effet de serre et donc jouer son rôle de membre responsable au sein de la communauté internationale. Au lieu de cela, nous, Australiens, vivons à présent aux dépens du reste du monde.
Le gouvernement australien n'écoute pas la communauté internationale des affaires, malgré le fait que les investisseurs responsables de 2,4 milliards de dollars d'actifs se sont récemment engagés à évoluer vers des portefeuilles neutres en carbone d'ici 2050. Ce gouvernement est également en décalage avec le leadership de la défense de l'Australie, qui reconnaît la menace que représente le changement climatique pour la sécurité mondiale, ainsi que la pression croissante causée par des missions permanentes de secours en cas de catastrophe dans la région. Il manque de respect envers l'opinion publique, en particulier envers la jeunesse, dont une grande partie commence à redouter ce monde dont elle va hériter.
Selon l'organisme scientifique national australien, l'Organisation de recherche scientifique et industrielle du Commonwealth, notre climat s'est déjà réchauffé de 1°C depuis 1910. Notre total de précipitations du milieu de l'année a diminué de 20 % depuis les années 1970 dans certaines régions du pays. Nos exploitants agricoles sont confrontés à des sécheresses 20 % plus longues, qui se prolongent et intensifient les saisons de feux de brousse. Le coût économique des catastrophes naturelles est déjà énorme : 182 milliards de dollars dans la décennie qui a précédé 2016, selon Deloitte Access Economics. Le niveau des mers devrait monter d'environ un mètre (39,4 pouces) d'ici 2100, mettant ainsi en péril 35 000 kilomètres (22 000 miles) de routes côtières et d'infrastructures ferroviaires. Non seulement les catastrophes naturelles coûtent des vies, détruisent des foyers et ruinent des ménages. Mais encore, elles font fermer des ports, mettent en péril des consortiums d'assurance, dévastent la production alimentaire et font exploser les budgets publics.
Inversement, la transition vers un avenir plus propre, en cas de bonne gestion, pourrait être une aubaine économique pour l'Australie. Nos importantes ressources en gaz naturel représentent une option plus propre pour effectuer cette transition depuis le charbon et le pétrole. Il existe un potentiel énorme pour la production d'électricité solaire sur notre vaste territoire baingé de soleil, à l'heure où les coûts de l'énergie solaire sont en train de baisser. Il en va de même pour l'énergie éolienne, du fait de notre long littoral et de notre vaste territoire. Nos scientifiques, nos chercheurs et entrepreneurs en énergie renouvelables disposent d'une d'expertise exportable considérable.
Plutôt que de réduire ses émissions, l'Australie augmente son empreinte carbone nationale en moyenne de 1 % par an depuis que mon gouvernement a quitté le pouvoir en 2013. En effet, nous prenons le chemin d'une augmentation de 8 % (par rapport aux niveaux de 2005), d'ici 2030. En revanche, le World Resources Instituteprédit que près de 60 pays représentant plus de 60 % des émissions, dont la Chine, auront déjà atteint des pics d'émissions à cette date. Cette donnée à elle seule ruine l'argument coutumier des conservateurs australiens, selon lequel l'Australie ne doit pas agir, parce que la Chine n'a rien fait.
L'objectif national d'émissions adopté par le gouvernement conservateur australien en 2015 prévoit une réduction de 26 à 28 % d'ici 2030, mais cet objectif est fallacieux. Le gouvernement du Premier ministre d'alors Tony Abbott l'a choisi parce qu'il reflétait la prévision du Président américain Barack Obama d'une réduction de 26 à 28 % des émissions américaines d'ici 2025. Abbott a prétendu à tort que son objectif était « le même que celui des États-Unis », alors qu'il savait très bien que l'objectif d'Obama représentait une réduction beaucoup plus importante de 41 % si on devait le maintenir jusqu'en 2030. Abbott a été aidé par les médias complices et négationnistes climatiques détenus par Rupert Murdoch, qui ont renforcé le mensonge.
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Quelles mesures auraient donc pu proposer des gouvernements australiens plus responsables ? Voici cinq idées concrètes. Premièrement, l'Australie aurait pu s'engager à revoir correctement son objectif climatique de 2015, qui était conforme à l'esprit et à la lettre de l'Accord de Paris. Si le nouveau système d'hydroélectricité tant vanté du gouvernement (Snowy Hydro 2.0) est vraiment aussi prometteur qu'on le dit, revoir nos ambitions nationales à la hausse ne devrait pas poser problème.
Deuxièmement, l'Australie aurait pu laisser tomber ce tour de passe-passe grossier sur les crédits de Kyoto inutilisés. Cette arnaque - que nos voisins du Pacifique détestent - est à présent utilisée par d'autres pays pour attaquer l'Australie sur la scène mondiale.
Troisièmement, l'Australie aurait pu mettre en place un calendrier pour une stratégie de décarbonisation à long terme, comme invite à le faire l'Accord de Paris. Ce travail devrait déjà être bien avancé, étant donné que le gouvernement l'a promis pour l'an prochain.
Quatrièmement, dans le cadre de cette stratégie, l'Australie aurait pu s'engager à atteindre zéro émission nette de gaz à effet de serre d'ici 2050, puis faire marche arrière à partir de là. Le Royaume-Uni et la Nouvelle-Zélande l'ont déjà fait, ainsi que 60 autres pays et trois États australiens.
Enfin, nous aurions pu suivre l'exemple du Royaume-Uni, de la France et d'autres pays en proposant de reconstituer le Fonds vert pour le climat, plutôt que de reformuler d'anciens engagements, qui vont imposer cette charge à des pays nécessiteux en les rendant directement applicables à nous plutôt qu'à une seule source mondiale.
Malheureusement, le gouvernement australien n'a rien fait de tout cela. Au lieu de cela, il a fermé les yeux pendant que nos exploitants agricoles se battent pour survivre, pendant que la Grande barrière de corail se meurt et que des catastrophes naturelles plus féroces encore tuent nos populations.
L'opposition de l'Australie - le Parti travailliste - est en train d'examiner officiellement ses politiques climatiques après sa défaite aux élections de mai dernier. Malgré les fulminations de l'extrême droite et de la fausse gauche, cette introspection est tout à fait normale. L'extrême droite n'a aucun intérêt à mener une action climatique et le Parti Vert de la fausse gauche a toujours été le parfait ennemi du bien. Personne en Australie n'oubliera jamais que le Parti Vert a rejoint les rangs des conservateurs pour vaincre la législation de mon gouvernement sur les régimes d'échange de droits d'émission au Sénat. S'ils n'avaient pas agi ainsi, l'Australie serait déjà dotée d'une tarification du carbone depuis une décennie - et serait bien plus proche d'un avenir à faibles émissions en carbone.
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